Je suis une fausse sceptique

Je suis une fausse sceptique, je doute vraiment de tout avec certitude ! La vie est un processus qui se déploie à l’infini. Il n’y a pas une expérience vraie et une autre qui ne le serait pas. Chaque point de vue exprime sa vérité du moment. Juger et contredire, cela fait parti du jeu de ce que peut expérimenter la manifestation, ce n’est pas à partir de « j’ai raison et ils ont tort » mais de « voilà ce que je ressens là dans cet instant ». Est-ce que c’est vraiment vrai ? Non ! Il n’y a aucune absolue vérité dans l’univers. C’est juste un point de vue qui peut être remis en question sans attachement à tout moment. J’expérimente des points de vue qui changent plus ou moins constamment . Ne serait-ce pas cela l’impermanence ? Alors ne rien savoir est l’ultime. Par corrélation, ne rien vouloir avec rigidité engendre la détente car ce que je pourrais désirer maintenant ne sera peut-être plus ce que je chérirai demain. Vivre à partir de cet espace où tout peut être, c’est l’abandon salvateur. Ce qui m’irrite parfois est l’arrogance de savoir, ce que je peux appeler aussi l’orgueil, auxquelles bien sûr je n’échappe pas. Et comment vivre à partir de cette conclusion ? Cela paraît totalement impossible car je me vis toujours à partir de ce monde « moi », un point de vue, donc je continuerai à avoir un angle de vue dont par exemple celui que j’expose là. Je ne peux pas échapper à ce qu’on appelle l’ego ou l’individu car l’infini est composé de multitudes de finis, mais l’infini est impossible par définition . Il n’est qu’une tendance et tous les finis sont nécessaires pour créer l’infini . La relation que chacun, chacune a avec cet innommable in(dé)fini est propre à chaque un, chaque une . Ce qui est formidable c’est que la façon dont chaque individu expérimente cet être universel , le (re)découvre, le décrit est finalement unique et similaire : d’où les témoignages si proches et si singuliers à la fois . Alors c’est drôle de prétendre : je valide ou j’invalide que untel parle bien de cela . Comment faire des généralités même en matière de soi disant absolu quand il est fait par un point de vue ? Se figer sur ce que serait un éveil me paraît une aberration parce que celui-ci est connu à partir d’une perspective différente d’une autre. Tout en pensant savoir qu’on parlerait de la même chose ? Ce ne sont que des pointeurs . Ce n’est pas objectivable . Comment savoir si le goût de la banane a la même saveur dans la bouche de ma voisine ? Le doute balaye chaque instant qui se fige dans l’illusion des constants « eurêka » qui se trouvent systématiquement remplacés par un mouvement prenant une autre direction. Même si certaines réalités pourraient sembler plus stables . La vie est juste une expérience qui se déploie, on ne peut rien fixer, ni un état, ni une connaissance, ni une expérience… Le début de quelque chose est toujours la fin d’une autre. Plus on est conscient de ce phénomène, plus on est libre des attachements et certitudes. Il n’y a pas des « ou » mais des « et ». Et la vie s’amuse à créer une multitude de façons de vivre cela aussi. L’amour c’est de voir que la spirale de vie n’a d’autre possibilité que de se déployer. Que toutes les ramifications possibles peuvent être expérimentées. C’est la joie de constater que c’est infini donc ouvert à tous les champs d’expérience. Critiquer ou juger, c’est oublier que la vie s’amuse à explorer un champ si vaste de possibles que chaque point de vue ne peut pas toujours se trouver proche de tous les points de vue. Et prétendre savoir ce que l’expérience d’un autre devrait être pour être étiquetée de la même façon, c’est insinuer que l’étiquette a une valeur fondamentale. Le mal-être vient probablement de ne pas ressentir cet unité de toutes ces perspectives qui n’en forment qu’une, intrinsèquement puisque le un fait l’expérience de se séparer en des multitudes d’expériences. Ne pas reconnaître que sans chaque un, il n’y a pas de formes de vie, c’est l’inconscience du sentiment de séparation. L’inconfort viendrait aussi de cette connaissance implicite que je peux me déployer dans toutes les directions de par ma nature, et que par l’expérience d’être fini, je ressens des limitations. Et que ces limitations créent automatiquement la frustration ou le manque, qui en découlent, mais qui sont le fioul de ce déploiement. Peut-être même que nous pourrions regarder ces aspects soit disant négatifs, la frustration et le manque avec un peu de tendresse en comprenant qu’ils sont la nature même de ce qui nous incite à étirer les possibilités . Sans s’en rendre compte, nous pouvons passer une vie à essayer de nous restreindre, et cela, en fait, nous fatigue. Il y a comme un implicite que nous ne pouvons que nous restreindre et de ce fait, on s’habitue à se contraindre dans une sorte de croyance limitante (pourtant à un autre niveau réelle) que l’on développe au fil de cette aventure qui serait la métaphore de « je ne peux pas tout » dans laquelle on peut finalement s’enfermer à outrance. Il n’y a vraisemblablement pas de sortie envisageable. Comment faire pour sortir du tout ? Et même si l’on peut expérimenter parfois ou plus souvent, plus ou moins, notre nature d’être complet, il ne peut nous être donné l’occasion que par des aperçus, des aperceptions, voir une reconnaissance profonde de cet ultime inatteignable mais toujours à partir ou en simultané, pourrait-on dire, d’une perspective . Ce sont des mots, des idées sans prétentions, une intuition qui plane, une tentative de réalité ici et maintenant, dont le seul intérêt est de rendre compte que la vérité n’a pas de consistance . Même les goûts changent . Et les couleurs ne sont, apparemment, pas vu de la même façon par tous… mais comment savoir ce que voit l’autre ? Je ne peux que être présente à ce qui se déroule à chaque instant ici maintenant dans mon monde . Et c’est toute la beauté de la chose . Je n’ai pas accès à autre chose . Alors comparer ce qui se passerait soit disant ailleurs que ici maintenant . Et mieux ! ce qui devrait être aperçu … Alors la vérité est un doute en suspens … une illusion … et le doute n’a pas d’existence… la vie est un éternel suspense .